Raphaël Jerusalmy à l’Université de Tel-Aviv : « Israël mène une seule guerre contre les forces du mal »
Jonathan Sitbon qui prépare un doctorat à l’Ecole des sciences de la culture de l’Université de Tel-Aviv sous la direction du Prof. Ruth Amossy, sur le thème « Je suis Juif », enseigne la sociologie dans le cadre du nouveau programme francophone ouvert par l’Ecole internationale de l’Université de Tel-Aviv pour favoriser l’alyah.
De l’ENS à Tsahal
Il a présenté l’intervenant : écrivain franco-israélien né à Paris en 1954 dans une famille marquée par la Shoah, Raphaël Jerusalmy a fait une khâgne à l’âge de 15 ans, puis l’Ecole Normale supérieure. Après ses études, il s’engage dans l’armée israélienne où il sert dans les services de renseignements. Officier de liaison en Amérique Latine, il rencontre notamment Pinochet et Arafat. Après une quinzaine d’années, il prend sa retraite de l’armée et devient négociant en livres anciens à Tel-Aviv. Ecrivain prolixe, il est l’auteur de plusieurs ouvrages traduits en plusieurs langues dont : Shalom Tsahal : confessions d’un lieutenant-colonel des renseignements israéliens (2002), Sauver Mozart : le journal d’Otto J. Steiner (2012), lauréat du Prix Emmanuel-Roblès 2013 et du prix littéraire de l’ENS, Les obus jouaient à pigeon vole (2016), Prix du Salon du Livre de Chaumont, Évacuation (2017), Prix Amerigo Vespucci, Manuel bleu contre l’antisémitisme et la désinformation (2019), Des Sex Pistols à l’Intifada : Confidences d’un officier israélien du renseignement (2021) et In Absentia (2022).
Il est de plus connu pour ses billets sur la chaine I24News, où il intervient en tant qu’expert militaire. Son prochain livre : Tribune de guerre, 2023-2025, qui est un recueil de ces billets, doit sortir dans les jours qui viennent. « Son style d’écriture a été forgé à l’ENS par Apollinaire », commente Jonathan Sitbon.

Raphaël Jerusalmy raconte que ce sont les succès de Tsahal en juin 1967 qui l’ont influencé et décidé à entrer dans l’armée israélienne, où il s’engage en 1982, où il est d’abord instructeur dans la marine, pendant la première guerre du Liban.
Un acte de résistance
Après avoir relaté de nombreuses anecdotes de son expérience dans l’armée, illustrant la complexité des relations intercommunautaires dans la région, il explique que le nouvel ouvrage est un recueil de ses analyses sur la chaine I24News depuis un peu avant le 7 octobre, comprenant de plus les commentaires du journaliste et écrivain franco-algérien Mohammed Sifaoui. « Sifaoui est un exégète qui non seulement analyse, mais aussi donne son opinion », dit-il.
Le conférencier expose tout d’abord le contexte dans lequel il a écrit son livre : « Actuellement la situation dans la Bande de Gaza est au point mort. Par contre à l’étranger, c’est une avalanche d’antisémitisme. C’est le moment de faire une pause tactique, de réfléchir, et d’avoir une vue globale sur ce qui est en train de nous arriver ». Il poursuit : « Le 7 octobre a eu un impact sur tous les domaines. Nous devons combattre la confusion et le désarroi dans lequel nous nous trouvons tous, nous dégager des écrans de fumée de la désinformation, des clichés et des slogans. Nous allons gagner, mais pour combien de temps ? Il faut nous rassurer, nous unir. Ce livre est un acte de résistance qui nous donne des armes pour le faire ».

A la question de Jonathan Sitbon: « Comment expliquer l’aveuglement des nations ? », Raphaël Jerusalmy répond qu’il s’agit en partie d’un aveuglement conscient motivé par l’intérêt (par exemple pour les capitaux du Qatar), des calculs politiques (les voix musulmanes), et par l’antisémitisme : « Nous assistons à une chute libre intellectuelle et morale qui devient tragique ».
Rassurer et simplifier
Le conférencier explique ensuite la méthode dont il se sert pour écrire ses articles. « La première étape est celle de la collecte de l’information. Pour cela, plusieurs sources sont disponibles : suivi des mouvements d’argent internationaux, renseignement d’origine électromagnétique de l’unité 8200, suivi des journaux arabes, et les ‘sources blanches’ de l’ensemble des informations accessibles au public. Il s’agit ensuite de vérifier les faits, trier l’information, l’analyser, poser les bonnes questions et proposer une action.
A tous ces niveaux, explique Jerusalmy, Israël s’est empêtré le 7 octobre : sur le long terme c’est la fameuse « conception », selon laquelle le Hamas avait fait marche arrière, et préférait gouverner plutôt que de détruire Israël, dans le cadre de laquelle les célèbres valises contenant des millions de dollars ont été introduites dans la Bande de Gaza par l’intermédiaire du Qatar; à moyen terme, la conception humanitaire et les permis de travail distribués aux Palestiniens, qui leur ont permis de cartographier avec précision les maisons de tous les kibboutzim de la zone frontière. Enfin, à court terme, l’aveuglement qui a permis la pénétration des bandes de terroristes sur 100 points de la frontière à notre insu, semant le désarroi dans les services de renseignement et les unités de l’armée.
Le but du livre, rappelle le conférencier, est de rassurer. Pour cela, dit-il, il faut simplifier. « A ma formation à l’armée, je dois la concision et le fait de ne pas parler pour ne rien dire ». Et effectivement, la conférence a été émaillée de quelques idées-force :
- Israël ne mène pas une guerre multi-fronts, mais une seule guerre sur un seul front, celle contre les forces du mal.
- Israël est une force stabilisante au Proche-Orient. Il a calmé le jeu à Gaza en neutralisant le Hamas, au Liban contre le Hezbollah et en Syrie.
- Tous les Etats arabes environnants reconnaissent l’excellence israélienne en matière de médecine et la recherche. Même chose dans le domaine des sciences agricoles.
- Il faut afficher de l’assurance, par exemple parler de « la force inégalée de Tsahal » ; nous avons les meilleurs drones ; notre système de défense anti-missiles laser est acheté dans le monde entier, l’intelligence artificielle nous permet d’améliorer encore certains services comme la Maguen David Adom, capable de réagir rapidement sur le terrain pour apporter du sang aux blessés.
- Le principal avantage d’Israël reste son atout humain et la motivation de nos soldats.